Jeudi 15 mars dernier, nous lancions notre série de meet-up à La Caserne. Une première table ronde pour parler d’initiatives concrètes autour de la mode circulaire.
À une époque où les systèmes de production sont dans le radar pour une filière textile plus vertueuse, des pratiques pas si nouvelles, mais en plein essor émergent sur le marché : seconde main, location, recyclage… Des solutions sur le devant de la scène pour accompagner les metteurs en marché à se conformer aux enjeux environnementaux et réglementaires.
REPENSER LA PRODUCTION TEXTILE DES PAYS DU NORD
« Plus de 15 millions de textiles issus des pays du nord sont reçus chaque semaine sur le marché de Kantamanto au Ghana » explique Andrée-Anne Lemieux, fraîchement rentrée de son voyage avec la Fondation Or. « Sur ces 15 millions, 40% finissent en décharge puis parfois dans la mer ». De tels chiffres nous interrogent réellement sur le caractère durable de la production textile de l’hémisphère nord.
Depuis plusieurs années maintenant, et dans un contexte où la fast fashion ne cesse de se développer, la qualité des vêtements, elle, se dégrade. Pour Aymeric Déchin, co-fondateur de Faume, une solution d’intégration de plateformes de seconde main, ce système est né d’un besoin exprimé des consommateurs de s’habiller à moindre coûts.
« UN PRODUIT EST PORTÉ EN MOYENNE 7 FOIS »
Pourtant aujourd’hui, ce business modèle est devenu incompatible avec l’urgence climatique à laquelle nous sommes confrontés. Des produits conçus en matières synthétiques, de mauvaise qualité et une durée de vie écourtée. Ces points, souvent occultés par les marques, sont à l’origine de la croissance exponentielle des déchets textiles non valorisables.
Selon Aymeric Déchin, les gens ont toujours ce besoin de s’habiller à moindre prix. C’est d’ailleurs de ce constat que des initiatives comme la seconde main et la location de vêtements naissent.
« Un produit est porté en moyenne 7 fois, en les optimisant avec des systèmes comme la location, les produits vont être portés plus de 60 fois » met en avant Léa Germano, la fondatrice de Studio Paillette, un site de location de vêtements.
« Je pense qu’il est important qu’on prenne conscience de cette mode jetable et d’ouvrir la question sur comment augmenter les cycles d’usage » relève Andrée-Anne.
Et si le problème était traité à la source pour que les produits durent dans le temps ? Créer un cercle vertueux où les marques seraient contraintes de produire de la qualité, en se tournant vers l’éco-conception pour anticiper l’impact et la fin de vie de leurs produits.
L’INFLUENCE DU RECYCLAGE TEXTILE TOUT AU LONG DE LA CHAÎNE DE PRODUCTION
Au delà de la qualité et de la durabilité imposés par la seconde main ou location, la filière textile devrait tester puis normaliser le recyclage, ici en Europe, afin d’en comprendre les règles, spécificités, limites et bénéfices. Comprendre ce que signifie valoriser une matière première. Comprendre pourquoi 100% des produits ne trouvent pas leur marché en fin de vie.
Bien que les décharges du Ghana soient en majorité alimentées de produits post-consommations, il y a un réel effort de sensibilisation à effectuer chez les professionnels, sur leurs matières premières et les différentes filières accessibles. Plus le sujet de la matière première est comprise en amont, par ceux qui la font produire, plus elle aura de chance de circuler durablement dans nos cycles de production.
Et d’un point de vue environnemental, il est nécessaire de souligner que nous n’avons pas de champs de coton en Europe, mais des stocks considérables de produits et textiles en fin de vie. Les détruire ou les exporter sans conscience, revient à gaspiller des millions de litres d’eau utilisés inutilement. Quand on sait que la raréfaction de cette ressource devient centrale dans le débat, avec 20% de l’eau potable disponible utilisée par l’industrie entière, et 4% pour la culture du coton, Weturn encourage les metteurs en marché à reprendre le contrôle de ces flux de produits, qu’ils soient neufs, invendus, ou déjà portés. La matière première ayant plus de valeur que le produit fini, et les prochaines années devraient nous le prouver.
L’idéal et ce que nous défendons dans notre vision 1/3 – 1/3 – 1/3 (dont nous vous parlions dans l’article MT®, la nouvelle référence du recyclé) serait d’arriver à un système où produits neufs éco-conçus, produits de seconde main et produits upcyclés-recyclés cohabiteraient.
L’heure est donc à la création de synergies entre tous les acteurs de l’industrie afin de se tourner vers un modèle circulaire.
Vous souhaitez écouter l’intégralité de l’échange ? Le podcast est disponible.